Les aspirations paternelles d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui. La perception de la paternité évolue… C’est avec fierté que les papas aiment désormais raconter leur bonheur de changer les couches et jouer aux princesses avec leur fille ! Pourtant, la paternité cherche sa place.
Malgré la valorisation de la relation père-enfant, ces « nouveaux » papas sont encore à la recherche d’un meilleur équilibre familial et professionnel.
Valoriser la paternité aurait aussi un intérêt féministe ! Dans le monde du travail par exemple, l’égalité femmes-hommes serait-elle plus accessible si les absences des pères, pour raison familiale, étaient mieux acceptées ? C’est en partie l’objectif du nouveau congé paternité entré en vigueur le 1er juillet 2021.
Famille, couple, enfants, entreprise, pourquoi l’investissement des papas est bon pour la société ?
Les papas sont ils oubliés ?
L’Union nationale des associations familiales (UNAF) estimait en 2016 que 86 % des pères élevaient leurs enfants d’une autre manière que leur propre père. Et près de la moitié s’inspiraient même de leur propre mère pour exercer leur paternité ! C’est dire qu’une mutation de la paternité s’est opérée en une génération. Mais dès qu’il s’agit de parentalité, il existe encore une fâcheuse tendance à ramener le sujet à la mère plutôt qu’au père.
A l’école par exemple, l’interlocuteur « naturel » est souvent la mère. D’ailleurs l’étude de l’UNAF indiquait que cette situation persistait alors même que le couple était séparé et l’enfant, en résidence habituelle chez le père. Pour améliorer la place de la paternité, l’UNAF préconise depuis plusieurs années de mieux former les professionnels de l’enfance et d’informer davantage l’ensemble des parents sur l’exercice de la coparentalité.
A l’école, chez le médecin, à l’hôpital, même si les mentalités évoluent, les stéréotypes ont la vie dure ! La société a longtemps considéré le rôle des pères comme moins important que celui de la mère dans l’éducation et la garde des enfants. « A la naissance de mon fils, c’est à ma femme que les sages-femmes de la maternité expliquaient comment lui donner le bain et pourquoi il régurgitait ! », explique Marc, papa quadra de 2 enfants. Impliqué et présent dans la vie quotidienne familiale, il souhaite que l’on considère « les pères aussi compétents que les mères ». Car la paternité est un tremblement de terre pour tous les parents… même les futurs papas ! Ces derniers pourraient être mieux intégrés aux parcours de naissance par exemple.
Les études montrent que les approches complémentaires des pères et des mères (ou d’autres référents) auprès des enfants et en particulier des bébés, sont essentielles pour la construction psychique de l’enfant. C’est la théorie de l’attachement : un jeune enfant a besoin, pour connaître un développement social et émotionnel normal, de développer une relation d’attachement avec les personnes qui prennent soin de lui de façon cohérente et continue (définition Wikipédia). Ainsi, il faut faire exister cette complémentarité en donnant davantage de place au père auprès du bébé et particulièrement durant les premières années de vie de l’enfant.
La paternité au service de l’égalité femmes-hommes
Affirmer la place fondamentale des pères au même titre que la mère, c’est donner aux femmes une chance de mieux répartir les responsabilités professionnelles et familiales. Pour en arriver là, il faut aider les pères à assumer davantage leur rôle ! Au-delà des éventuelles craintes personnels qu’un papa peut avoir, la société française encourage-t-elle suffisamment la paternité ?
Déjà en 2011, l’Observatoire de la parentalité en entreprise formulait une dizaine de propositions en faveur d’une parentalité plus équitable, comme le recours au temps partiel pour les pères, le télétravail, la formation des managers ou encore l’allongement du congé paternité. Sur ce dernier point, l’Observatoire a été entendu… même si beaucoup trouvent la mesure encore trop timide : le congé paternité passe de 11 à 28 jours. Aujourd’hui, 3 pères sur 10 ne le prennent pas. Désormais, avec le « congé de paternité et d’accueil de l’enfant » (c’est son nouveau nom !), il sera « obligatoire » pour le papa de prendre au minium 7 jours au moment de la naissance.
Quant au congé parental, pourtant destiné aux deux parents indifféremment de leur sexe, seul 1 % des pères « osent » le prendre. Si le faible montant de l’indemnisation accordée est en partie responsable de ce (triste) constat, une étude de l’Observatoire français des conjonctures économiques (avril 2021) remarque « un effet genré du congé parental ». Hélène Périvier et Grégory Verdugo, co-auteurs de l’étude, suggèrent une vaste campagne d’information et de sensibilisation auprès du grand public et en entreprise, pour réduire ce biais de genre.
La peur d’être mis de côté, de freiner sa carrière, d’être jugé négativement par ses collègues ou sa hiérarchie, nuit toujours à l’épanouissement paternel ! Ces freins existent déjà pour les femmes face à la maternité.
Des congés parentaux mieux répartis pourraient aussi avoir un effet sur le partage des évolutions de carrière et de salaire entres les deux conjoints.
Plus nous aurons des pères investis dans la vie familiale, plus l’équilibre et l’égalité entre les deux membres du couple deviendra réel.
Comme l’ont prouvé de nombreuses études, les politiques de QVT en entreprise sont favorables à tous les salariés… y compris les papas ! Cependant, les mesures de soutien à la parentalité en entreprises, notamment l’équilibre des temps de vie, sont souvent adressées aux femmes. Désormais, les entreprises doivent entendre le désir de parentalité sereine des pères !
Les actions existent : flexibilité des horaires de travail, convention collective favorable à la paternité, lutte contre le « présentéisme masculin », télétravail, etc.
Quand le bien-être des salariés est une priorité pour l’entreprise, cette dernière se veut plus performante. Car les salariés bénéficiant d’aménagements du temps de travail sont plus productifs, plus motivés et plus fidèles.
Chartes et labels RH : ont-ils un réel impact sur la QVT ?
Les nouvelles générations sont encore plus en demande de reconnaissance de la paternité en entreprise. Une formule « gagnant-gagnant » que nombres d’entreprises ont compris car beaucoup offrent une QVT de plus en plus adaptée aux salariés-parents.
Mais le tissu économique français est particulier : il est constitué à plus de 99 % de PME-TPE, et pour ces dernières, favoriser l’investissement des papas a un coût. Elles emploient près de la moitié de la masse salariale en France. Cependant la condition principale requise pour une démarche QVT est d’abord l’instauration d’un dialogue à tous les niveaux et un management participatif. Par son action sur la motivation individuelle et collective, la QVT contribue à déconstruire les préjugés liés à la paternité en entreprise.
Qu’il s’agisse d’une TPE, d’une start-up ou d’un grand groupe, les initiatives QVT, même si elles différent d’une organisation à une autre, ont un impact sur la performance de l’entreprise !
« Le congé, prends-le comme un homme ! » lançait le gouvernement danois en 2017, dans une campagne de communication publique. Comme chez nos voisins scandinaves, il faut changer les mentalités et encourager la paternité ! Même si le chemin est encore long, en soutenant l’investissement des papas, l’égalité réelle entre les femmes et les hommes trace sa route…