Télétravail et management par la confiance

Temps de lecture : 6 min

Et si on faisait confiance… à la confiance ?

La confiance lie les amitiés, influe sur les décisions, facilite les négociations et résout même les conflits ! À l’ère du télétravail et des relations sociales dématérialisées, la confiance est-elle devenue un incontournable du management ?

À l’origine du concept du management par la confiance : les relations humaines 

Il est surprenant de constater que la confiance est parfois absente dans les relations de management. Pourquoi la confiance manager-salarié est-elle négligée ? 

Le management par la confiance n’est pourtant pas un concept si récent. À l’origine, il y a la naissance d’un mouvement social qui apparaît Outre-Atlantique dans les années 30, après l’essor du Taylorisme : le mouvement des Relations Humaines. Il démontre la place centrale de la psycho-sociologie dans le travail et en particulier dans le management. Plus tard, dans les années 60, Douglas McGregor, professeur de management, définit deux systèmes de valeurs managériales, cohérents mais totalement opposés. C’est d’abord la théorie X, selon laquelle le management suppose que les employés sont intrinsèquement paresseux et éviteront de travailler s’ils le peuvent. Ils doivent être surveillés par des systèmes complets de contrôle (ambiance !). À l’opposé, dans la théorie Y, le management suppose que les employés sont ambitieux, motivés, désireux d’assumer plus de responsabilités et d’autonomie. 

Ces théories sont toujours présentes dans le fonctionnement des entreprises et font partie des préjugés propres à chaque manager. Une enquête du cabinet Price Waterhouse Cooper (PWC) montrait déjà en 2016 que 50 % des PDG considéraient le manque de confiance comme une menace pour la croissance de leur entreprise

Que l’on soit manager ou managé, le management par la confiance nous interpelle. Ce concept fait appel à nos valeurs personnelles tout en promettant une meilleure performance professionnelle. Dans un contexte de télétravail, c’est ce cercle vertueux que recherchent les salariés pour (re)trouver de bonnes conditions de travail.

Vers un changement de pratiques managériales en télétravail

Les entreprises ont compris qu’un employé heureux était plus productif. En 2019, on estimait que la première cause de dépression ou de départ de l’entreprise serait la mésentente avec son manager. Si la méfiance prend le dessus sur la confiance, la communication en souffre.

Pour encadrer le télétravail et prévenir le risque d’isolement des télétravailleurs, le Ministère du Travail et les organisations patronales et syndicales ont signé en novembre 2020 un projet d’Accord National Interprofessionnel[1](ANI). Celui-ci confirme que le management par la confiance reste indispensable : 

« Le télétravail repose sur un postulat fondamental – la relation de confiance entre un responsable et chaque salarié en télétravail – et deux aptitudes complémentaires – l’autonomie et la responsabilité nécessaire au télétravail. »

L’ANI insiste sur la nécessité d’assurer la montée en compétences des salariés comme des managers face à ces changements, à travers des formations, un accompagnement, etc.

Eric Eisenberg, directeur général de Medireport, a dirigé de nombreuses entreprises et expérimenté le management sous diverses formes. Il accompagne aujourd’hui ses équipes en télétravail et selon lui, « le management par la confiance fait partie de l’Art du management ». 

L’impact du Covid sur les temps de vie

Cependant, chaque manager, selon sa personnalité, ses responsabilités, ses équipes et désormais son cadre de travail doit savoir adapter son management. « Dans un contexte de télétravail, le risque majeur est de tomber dans le micro-management », souligne-t-il. Le contrôle visuel, par exemple, généralement associé à une présence physique dans les bureaux n’est plus possible avec la distance. En micro-management, le manager n’a de cesse de vouloir tout garder sous contrôle, sans rien déléguer. Il risque de créer volontairement ou non des situations de tension. Cette attitude entretien un sentiment d’insécurité. Or dans un contexte de télétravail, le manager a besoin de s’appuyer sur la capacité de ses collaborateurs à prendre des initiatives ou à résoudre certaines problématiques en toute autonomie.

Face aux nouveaux défis du télétravail, le management par la confiance aidera donc les équipes à être plus réactives et à mieux s’adapter aux situations nouvelles ou difficiles. 

Faire confiance et inspirer confiance 

Comment instaurer un management plus performant mais générateur de sens et en phase avec les défis d’aujourd’hui ? 

Il suffit de… reprendre les bases du management.

Des outils numériques au service du collectif 

Comme le dit l’adage : « la confiance n’exclut pas le contrôle », à condition bien sûr de ne pas tomber dans le micro-management. 

Eric Eisenberg invite les entreprises « à mettre en place des modalités de reporting qui vont soutenir la pratique du télétravail », c’est-à-dire le travail en autonomie.  Il faut définir la fréquence de reporting et les modalités de rendu, tout en laissant plus de flexibilité dans l’accomplissement des tâches. Cela permet de responsabiliser le télétravailleur et de donner les bonnes informations au manager pour l’accompagner si nécessaire.

Le manager doit s’approprier ces nouveaux outils de communication et de collaboration et se former à ces outils, avant de former son équipe à leur utilisation. Chaque entreprise selon ses besoins et sa taille peut facilement trouver les outils numériques adaptés, comme Trello pour de la gestion de projet, Slack pour faciliter la communication, ou encore Monday.com pour gérer des process. L’offre de logiciels et applications est aujourd’hui très large et ne se limite plus à Microsoft Teams ou aux outils Google. 

Les bonnes pratiques managériales

Comme dans toute relation, la confiance entre un manager et un salarié doit être réciproque. Or, la communication est au cœur des relations humaines, alors exprimons-nous ! 

Dans le cadre du télétravail, le manager et le salarié (ou les équipes) peuvent par exemple travailler ensemble à la définition des objectifs, comme avec la méthode « SMART ». 

Selon celle-ci, les objectifs définis doivent être :

  • Spécifiques
  • Mesurables 
  • Accessibles 
  • Réalistes
  • Temporels

Une bonne communication et des outils de reporting adaptés permettent au télétravail de se faire en toute transparence et avec bienveillance.

Selon les recherches de Philippe Rodet et Anne Cloarec, auteurs de nombreux travaux sur la santé et le bien-être au travail, il y a deux conditions pré-requises pour développer la confiance du collaborateur envers son manager :

  • Donner le juste niveau d’autonomie : si un manager laisse de l’autonomie, c’est qu’il a confiance en son collaborateur. 
  • Apporter un sentiment de justice : en encourageant régulièrement un collaborateur, cela lui apportera plus de confiance. À condition bien entendu que les compliments soient sincères et argumentés. Une critique sera par ailleurs mieux accueillie si elle est émise avec autant de bienveillance qu’un compliment.

Le management par la confiance s’inscrit dans une relation « à long terme ». Si le manager montre de l’authenticité et une force d’engagement, la relation aura des bases solides.

Finalement, la confiance ne se décrète pas mais se construit, même en télétravail, et à condition de maintenir :

  • la proximité, physique ou virtuelle mais propice à la communication
  • la responsabilisation
  • l’autonomisation
  • le suivi de l’activité (reporting)
  • l’apprentissage collectif

Cette confiance aide les salariés à s’exprimer et à se réaliser professionnellement.


[1] https://www.fntp.fr/infodoc/travail-protection-sociale/relations-individuelles-de-travail/embauche/nouvel-accord

Publié par L’équipe Share(d)

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