Chez sa mamie, avec sa nounou ou la baby-sitter, votre enfant est « sage comme une image » ! Rien à voir avec le comportement changeant, émotif ou nerveux qu’il adopte avec papa ou maman. Comment l’expliquer ? Pourquoi les enfants semblent-ils plus difficiles avec leurs parents ? Focus sur la théorie de l’attachement.
La théorie de l’attachement, c’est quoi ?
Combien de fois a-t-on remis en cause notre parentalité à l’écoute de la punchline de mamie : « Il n’y a qu’avec toi qu’il fait le difficile ». Autre variante : « C’est parce qu’avec moi, il sait que ça ne marche pas. » Les jeunes parents entendent aussi : « Elle sent que je suis détendue, moi, donc elle est calme. » Ces remarques déconcertantes sont banales dans l’entourage des parents. Pas de panique : en réalité, c’est plutôt rassurant. Plusieurs facteurs expliquent ces changements de comportement, notamment la théorie de l’attachement.
Formalisé par le psychiatre et psychanalyste anglais John Bowlby dans les années 50, la théorie de l’attachement soutient que l’enfant, pour se développer sur le plan affectif, social et intellectuel, a besoin de former une relation affective privilégiée avec son entourage proche, sa famille. Le plus souvent, il s’agit bien sûr des parents, parfois de la mère en particulier. Plus l’enfant perçoit ce lien d’attachement comme étant inconditionnel, plus il est à l’aise avec son environnement, pour tester ses interactions, ses limites et ses émotions. Si on se réfère à cette théorie de l’attachement, on comprend mieux pourquoi notre petit ange teste nos limites et nos nerfs, et pas ceux de la nounou.
Les bébés suivent différentes phases de développement de l’attachement. A partir de 2 ans, si leur besoin est comblé, ils sont plus à l’aise pour s’éloigner, tranquillement et temporairement, de leurs figures d’attachement principales, les parents.
Toujours d’après la théorie de l’attachement, la place de la famille est essentielle. Avec une personne étrangère au cercle familial, l’enfant peut ressentir moins d’admiration, d’émotions, d’affection ou d’intérêt. Cela ne veut pas dire qu’il n’aime Papi et Mamie. Mais ils ne sont pas les personnes qui prennent soin de lui de façon cohérente et continue.
Exemples de comportements d’attachement
En présence de la figure d’attachement (il peut y en avoir plusieurs), les enfants n’ont aucune réserve à exprimer leurs émotions, à être totalement « eux-mêmes », ils se sentent à l’aise… et au fond, tant mieux. En revanche, en dehors de leurs figures d’attachement, ils n’osent pas exprimer pleinement leur avis, leur stress ou toute autre émotion (tristesse, inquiétude, etc.) C’est déroutant voire stressant pour les parents, mais il est important de différencier un comportement perçu comme plus difficile par le parent alors qu’il est simplement plus naturel.
D’après John Bowlby, père fondateur de la théorie de l’attachement, les jeunes enfants, surtout les bébés, emploient divers comportements innés qui favorisent l’attachement : le fait de s’agripper (comportement d’agrippement), sucer et suivre (comportement de proximité), pleurer et sourire (comportement de signalisation). Les parents, apportant le réconfort nécessaire aux enfants dans ces situations, deviennent les figures d’attachement à travers la répétition de ces expériences. Ce sont des signaux importants à prendre en compte, en tant que parents, notamment lorsque l’enfant grandit, indiquant que ce dernier a besoin d’attention ou de soin.
Répondre au besoin d’attachement des enfants
C’est bien jolie la théorie de l’attachement, mais en pratique, comment faire ? Un jeune enfant qui fait preuve de retenue toute la journée, à l’école par exemple, sans ses figures d’attachement, accumule des tensions, du stress, des émotions. Il ose moins se confier, se « lâcher ». Ce comportement a tendance à provoquer une décharge émotionnelle en fin de journée, face aux parents. Il arrive que l’enfant s’énerve pour un rien, cherche à désobéir ou à transgresser les règles. Ce que l’on qualifie souvent de « caprices » ou de « crises » sont en fait un débordement d’émotions. Or ces comportements sont instinctifs. Le plus difficile en tant que parent est d’arriver à oublier le prétexte déclencheur, pour répondre au besoin d’attachement par divers moyens :
- Remplir le « réservoir » d’amour : métaphore du niveau de notre bien-être affectif, le réservoir affectif se résume au besoin d’amour que nous avons tous, enfants et adultes. Pour se sentir en sécurité, s’épanouir et bien grandir, les enfants ont besoin de câlins, de gestes tendres, d’encouragements ainsi que de preuves d’amour. Qu’elles soient verbales (« je t’aime, je suis fière de toi ») ou non verbales (faire une activité ou un jeu ensemble, accorder pleinement son attention, etc.), ces actions renforcent le lien d’attachement et remplissent le réservoir.
- Prendre un temps de qualité : la qualité vaut mieux que la quantité : 20 minutes de temps de qualité quotidien avec nos enfants sont suffisantes pour accroître le lien d’attachement. Faire un jeu en tête à tête, jouer ensemble au parc, s’amuser à faire les fous sur le lit, lire une histoire, l’objectif est d’inscrire ces moments de jeu dans le quotidien en se laissant guider par l’enfant. On lui consacre toute notre écoute et notre attention (un seul enfant à la fois si possible), sans autre forme de distraction (télévision, téléphone…).
- S’autoriser à ne pas être un parent parfait : ni parfait, ni idéal, ni omniprésent, nos enfants ont besoin d’un parent aimant et « humain », qui a le droit de faire des erreurs, comme tout le monde. Le plus important reste que votre enfant sache que vous l’aimez et qu’il peut compter sur vous.
- Accepter son enfant tel qu’il est : chaque enfant est différent, avec ses forces et ses faiblesses. Au quotidien, on a parfois du mal à reconnaître les bons moments et à accepter les moments difficiles. Or sans acceptation, il est plus compliqué de trouver le respect, la patience ou encore la tolérance, nécessaire pour gérer des situations pénibles et stressantes.
- Demander de l’aide : si la situation devient trop difficile à gérer, il ne faut pas hésiter à se tourner vers les professionnels de la santé ou de la petite enfance. Médecins, pédiatres, psychologues, PMI, associations, il existe des dispositifs de soutien à la parentalité en France.
Ce n’est pas toujours facile de constater que son enfant est plus « sage » avec d’autres personnes que ses propres parents. Pourtant, ce comportement exprime tout simplement son sentiment de sécurité avec nous et sa capacité à s’adapter aux situations difficiles sans nous…