Le culte de la performance est bien présent partout dans la société, autant dans la sphère professionnelle que personnelle. Mais aujourd’hui, « réussir » ses enfants serait devenu un devoir social ! Sur les réseaux sociaux, c’est la course au parent le plus exemplaire, à grands renforts de filtres photos et de contenus discrètement sponsorisés ! Le « parent parfait » n’existe pas… et heureusement, comme nous le dirait Isabelle Filliozat, figure phare de la parentalité positive en France. Mais pourquoi vouloir être un « parent parfait » ? Existe-t-il un mode d’emploi de la parentalité ?
La quête du « parent parfait »
Pour être une « mère parfaite » et faire comme ses copines qui affichent leur bonheur sur les réseaux sociaux, Florence, maman de deux enfants, s’est lancée dans une course à la perfection dès leur naissance. Ateliers créatifs, cours de bébé-nageur, séances massage, elle s’est aussi sentie obligée d’allaiter et nourrir sa progéniture à base de bio et de fait-maison uniquement… au risque que leur éveil ou leur développement ne soit pas « optimal » ! Florence a fini par s’épuiser physiquement et psychologiquement. A 35 ans, elle a fait un burn-out parental. Comme de nombreux parents, elle a manqué de repères en matière d’éducation. « On se compare beaucoup, avoue-t-elle. Et ça me fait douter de mes propres compétences parentales ». Le spectre du « parent parfait » est partout : émissions, livres, magazines, … et encore plus visible sur les réseaux sociaux ! L’enfant est-il devenu le nouveau signe extérieur de réussite ?
Notre société se montre parfois peu compréhensive envers les parents. S’ils s’impliquent trop, on les accuse d’être des parents-rois. S’ils n’en font pas assez, on leur reproche de négliger le bien-être de leurs enfants. La bienveillance, désormais au cœur des principes de l’éducation, fait rêver avec ses promesses d’entente, de sérénité, d’écoute. Ne pas crier, se montrer à l’écoute des besoins des enfants, respecter leur rythme, etc. Pour ne pas compromettre l’avenir de leurs enfants, beaucoup de parents se mettent alors une pression terrible. Pourtant, si nous sommes aujourd’hui dans un monde où l’accès à l’information est multiple, nous ne sommes pas tous des professionnels de la psychologie enfantine ! Face à ces théories éducatives contemporaines, d’apparence faciles, se heurtent alors la réalité des familles et la culpabilité de certains parents de ne pas être « parfaits ».
Le piège des réseaux sociaux
Si les réseaux sociaux nous permettent de partager des fragments de nos vies, d’échanger avec d’autres parents ou d’y trouver du soutien, leur utilisation comporte certains pièges. Les images de la « mère parfaite », toujours pimpante, sportive et de bonne humeur, ou du « parfait bébé » souriant dans sa belle poussette ergonomique, pliable et légère, et sans miettes de gâteaux dedans, sont omniprésentes ! Ces belles images, à l’instar des mannequins « photoshopées » dans les magazines, nous renvoient à notre propre condition et peuvent faire naître un sentiment de culpabilité, voire d’infériorité. Comparaison toxique, injonction parentale, course à la perfection et peur du jugement engendrent un stress déraisonné.
Comment ne pas se comparer à ces mères parfaites dont les photos, prises sous le bon angle et au bon moment, attirent l’œil et les clics ? Que penser de toutes les consignes qui fleurissent sur la toile ? Sous prétexte de nous apporter des solutions simples et scientifiquement validées, bon nombre de néo-experts en parentalité ou coachs auto-proclamés alimentent en réalité un flot d’injonctions, souvent peu adaptés à la situation de la plupart des familles.
De l’importance d’être imparfait dans la vraie vie
Dans la vie, la vraie, il ne reste pas beaucoup d’énergie, de temps ou d’argent aux parents débordés, pour respecter à chaque instant les merveilleux préceptes de l’éducation bienveillante ou de la parentalité positive ! Pourtant, les parents d’aujourd’hui s’investissent avec force, courage et enthousiasme dans l’éducation. Souvent bien plus que les générations précédentes. Car les sociétés occidentales ont commencé à s’intéresser plus rigoureusement à la parentalité depuis le début des années 70 seulement. Nourris de ces nouvelles connaissances, les parents, bombardés d’injonctions éducatives, cherchent à les appliquer au quotidien, tout en culpabilisant de ne pas y arriver !
Mais la perfection est une véritable mythologie – qui ne concerne pas seulement la parentalité d’ailleurs. Or, pour être un « bon » parent, il est important d’arriver à ne pas être parfait justement ! Pour Boris Cyrulnik, accepter nos défauts serait la clé du bonheur. L’auteur et médecin psychanalyste rappelle que l’homme, depuis la nuit des temps, en recherchant la perfection, a permis l’évolution et l’adaptation à ses environnements. Il faut donc distinguer l’envie de bien faire (ou mieux faire) et la quête de perfection. La première est un facteur de progression, un formidable moteur, mais cela ne veut surtout pas dire « faire parfaitement » !
5 conseils pour arrêter de vouloir être parfait !
Visez la progression, pas la perfection.
L’objectif est de faire de son mieux, en tant que parent comme dans tout ce que l’on entreprend, en ayant conscience qu’il peut y avoir des imprévus ou des ratés.
Acceptez l’échec.
Si les choses ne se déroulent pas comme prévu, rien n’est irrémédiable. Les échecs font partie de l’apprentissage de la vie, nous aident à apprendre de nos erreurs. Seul le courage de continuer compte. C’est une belle philosophie à transmettre aux enfants.
On ne juge plus, on observe.
Alors que la peur d’être jugé paralyse, le jugement envers soi-même ou les autres tyrannise. Cessons d’être dans le jugement ou de se comparer aux autres. Toutes les familles sont différentes et il n’existe pas qu’un seul modèle éducatif ou parental.
Vivez le moment présent.
L’organisation et l’anticipation, c’est bien – surtout quand on est parent ! Mais profiter du moment présent aide à faire plus attention à soi et à tout ce qui nous entoure.
Donnez de l’importance à ce qui compte vraiment.
Et si l’on accordait plus de temps aux personnes qui nous sont chères plutôt qu’aux objets matériels ? Se poser la question de ce qui est le plus important pour soi permet de faire le tri dans nos obligations, de lâcher-prise ou de déléguer sur le reste. Et tant pis si ce soir, il reste des traces de purée de carottes sur la table de la cuisine !